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Recherches historiques autour de la Bible, de Jésus et des premiers chrétiens

Qu’est devenue l’Arche d’Alliance ?

 

Qu’est devenue l’Arche d’Alliance ? (1/3)

 

 

L’Arche d’Alliance est longuement décrite dans les XXVe et XXXVIIe chapitres du Livre de l’Exode comme un coffre en bois d’acacia de 1,15 m (2 coudées et demie) de long sur environ 0,70 m de haut (1 coudée et demie) et autant de large. Elle était recouverte d’or au dehors comme au dedans. À chacun des 4 pieds était un anneau d’or. On transportait le précieux coffre au moyen de deux barres, également en bois d’acacia et recouvertes d’or, qui passaient de chaque côté dans deux anneaux d’or. Au-dessus de l’Arche, l’énorme couvercle en or massif, appelé « propitiatoire », avait les mêmes dimensions que le coffre, en longueur comme en largeur. À chaque extrémité, un chérubin en or (deux au total), tout en faisant corps avec lui, déployait ses ailes au-dessus du propitiatoire comme pour le protéger. C’est d’entre ces deux chérubins que Yahweh devait se manifester à son peuple : 

 

« C’est là que je te rencontrerai. C’est de sur le propitiatoire, d’entre les deux chérubins qui sont sur l’arche du Témoignage, que je te donnerai mes ordres pour les Israélites. »

 

Exode XXV, 22.

 

Le précieux coffre devait être placé dans le Saint des Saints, du Tabernacle tout d’abord (Exode XXVI, 33, 34), puis du Temple de Jérusalem (I Rois VIII, 1-9 ; II Chroniques V, 1-10). D’après une tradition attestée au ier siècle de notre ère et rapportée dans le Nouveau Testament, l’Arche aurait en fait contenu 3 choses : « une urne d’or contenant la manne, le rameau d’Aaron qui avait poussé, et les tables de l’Alliance » (Hébreux IX, 4). Cette tradition s’accorde avec Exode XVI, 33-34 où l’on voit Moïse conserver de la manne dans un vase, et avec Nombres XVII, 25 où l’on peut lire que la verge d’Aaron, qui avait fleurie, fut placée, tout comme le vase de manne, devant les tables de la Loi. Pourtant, nous dit-on ailleurs, du temps de Salomon, l’Arche ne contenait rien, sinon : « les deux tables de pierre que Moïse y déposa à l’Horeb, quand Yahweh avait conclu alliance avec les Israélites à leur sortie de la terre d’Égypte » (I Rois VIII, 9, 21), c’est-à-dire uniquement les deux tablettes en pierre contenant les dix commandements (II Chroniques V, 10).

 

En décembre-janvier 598-597 av. J.-C., Nabuchodonosor assiège et prend Jérusalem :

 

« Celui-ci emporta tous les trésors du Temple de Yahweh et les trésors du palais royal et il brisa tous les objets d’or que Salomon, roi d’Israël, avait fabriqués pour le sanctuaire de Yahweh, comme l’avait annoncé Yahweh. »

 

II Rois XXIV, 13.

 

En Juin-juillet 587 av. J.-C., après un an de siège, Jérusalem est de nouveau investie par les troupes de Nabuchodonosor. Mais, cette fois, la Ville est dévastée et, surtout, le Temple est complètement ravagé par les flammes (II Rois XXV, 9). Tout ce qu’il contenait encore de précieux et qui avait pu échapper au précédent pillage est alors emporté à Babylone (II Rois XXV, 13-17). D’après une tradition plus tardive du Chroniste, reprise par l’auteur du Livre de Daniel (Daniel I, 2) mais ignorée du 2e Livre des Rois, il y aurait eu, autour de 600 av. J.-C., lors de la révolte de Joiaqim, un premier sac du Temple par Nabuchodonosor : « Nabuchodonosor emporta aussi à Babylone une partie du mobilier du Temple de Yahweh et le déposa dans son palais de Babylone » (II Chroniques XXXVI, 7). Le Chroniste signale, en effet, non pas deux mais trois pillages successifs du Temple (II Chroniques XXXVI, 7, 10 et 18-19). Quoi qu’il en soit, c’est bien entre 600 av. J.-C. au plus tôt, et 587 av. J.-C. au plus tard, que l’Arche d’Alliance disparaît définitivement du Temple de Jérusalem. Qu’est-elle donc devenue ?

 

En 538 av. J.-C., soit un an après la prise de Babylone par le roi des Perses Cyrus ier, les Judéens déportés sont autorisés à regagner leur terre natale et à rebâtir le Temple de Jérusalem. La reconstruction commence en 537 pour s’achever en 515 av. J.-C. Parallèlement, « le roi Cyrus fit prendre les ustensiles du Temple de Yahweh que Nabuchodonosor avait apportés de Jérusalem et offerts au temple de son dieu » (Esdras I, 7 ss. ; V, 14, 15). Esdras nous a conservé la liste précise des objets restitués (Esdras I, 9-11), mais le plus précieux, l’Arche d’Alliance, n’y figure pas.

 

Près de 400 ans plus tard, en 169 av. J.-C., le Temple de Jérusalem est de nouveau pillé :

 

« Ayant ainsi vaincu l’Égypte et pris le chemin du retour en l’année 143, il marcha contre Israël et sur Jérusalem avec une armée imposante. Entré dans le sanctuaire avec arrogance, Antiochus enleva l’autel d’or, le candélabre de lumière avec tous ses accessoires, la table d’oblation, les vases à libation, les coupes, les cassolettes d’or, le voile, les couronnes, la décoration d’or sur la façade du Temple, dont il détacha tout le placage. Il prit l’argent et l’or ainsi que les ustensiles précieux et fit main basse sur les trésors cachés qu’il trouva. Emportant le tout, il s’en alla dans son pays ; il versa beaucoup de sang et proféra des paroles d’une extrême insolence. »

 

I Maccabées I, 20-24.

 

Tout le mobilier précieux est alors saisi par Antiochos Épiphane (cf. II Maccabées V, 16). Il ne sera jamais récupéré. Seul l’or intéressait Épiphane : les ustensiles qui en contenaient durent donc être fondus pour renflouer les caisses du roi. Quelques années plus tard, lors de la purification du Temple par Judas Maccabée (164 av. J.-C.), tout dû être refait à neuf, mobilier comme ustensiles (I Maccabées IV, 48-49 ; Flavius Josèphe, Antiquités Judaïques, XII, vii, 6, § 318). Un siècle plus tard, quand Pompée s’empare à son tour de Jérusalem et entre dans le Temple (63 av. J.-C.), ce sont ces mêmes objets qui se trouvent dans le lieu Saint, à savoir : la table pour les pains de proposition, l’autel des parfums et le chandelier à sept branches, ainsi que d’autres richesses (Flavius Josèphe, Antiquités Judaïques, XIV, iv, 4, § 72). Selon l’historien grec Dion Cassius (v. 150-235 apr. J.-C.), « le temple fut pris le jour de Saturne, sans aucune résistance, et tous les trésors livrés au pillage » (Histoire Romaine, XXXVII, xvi, 6). Mais, d’après des sources plus anciennes, Pompée se serait en réalité contenté « par piété », précise Flavius Josèphe – d’observer l’intérieur du bâtiment et il aurait laissé les choses en l’état (Antiquités Judaïques, XIV, iv, 4, § 72). Cicéron, contemporain des événements et, surtout, adversaire de Pompée, le confirme expressément : « Pompée, vainqueur de Jérusalem, ne toucha rien dans ce temple » (Pro Flacco, XXVIII, 68). Qu’y avait-il alors dans le Saint des Saints selon ces témoignages ? Rien, nous dit-on. Celui-ci était vide et cette absolue vacuité, qui ne correspondait ni à leurs propres usages, ni à ceux d’aucune nation barbare qu’ils connaissaient, intrigua fort les nouveaux conquérants, ainsi que l’historien Tacite le rapporte :

 

« Pompée est le premier des Romains qui ait dompté les Juifs et soit entré par droit de conquête dans leur temple. On connut alors qu’il n’y avait à l’intérieur aucune image des dieux, que la place était vide, et que les secrets du sanctuaire n’étaient rien. »

 

Histoires V, 9.

 

Du temps de Jésus, tandis que le Saint des Saints – la partie la plus reculée du Temple – est toujours vide, ce sont toujours les mêmes objets qu’on trouve dans le lieu Saint :

 

« La première partie, qui était découpée à quarante coudées, contenait trois œuvres d’art absolument merveilleuses et universellement célèbres : un chandelier, une table et un autel à encens. Les sept lampes du chandelier (qui avait en effet sept branches) symbolisaient les planètes ; les douze pains placés sur la table, le cercle du Zodiaque et l’année ; l’autel à encens, grâce aux treize parfums qu’on y brûlait et qui étaient tirés de la mer et de la terre, tant déserte qu’habitée, signifiait que tout est de Dieu et à Dieu. La partie la plus à l’intérieur avait vingt coudées ; elle était séparée de la partie extérieure de la même façon par un voile ; elle ne contenait absolument rien, mais l’entrée en était interdite à tous, elle était inviolable et soustraite aux regards. Elle était appelée le Saint des Saints. »

 

Guerre des Juifs, V, v, 5, § 216-219.

 

En 70 apr. J.-C., le Temple, de nouveau mis à sac, est ravagé par les flammes. Une fois matée la révolte des Juifs, Titus célèbre à Rome son triomphe :

 

« Les dépouilles, dans leur ensemble, étaient transportées pêle-mêle ; mais on remarquait, parmi toutes, celles qui avaient été prises dans le Temple de Jérusalem : une table en or pesant plusieurs talents, un chandelier également en or mais conçu autrement que ceux dont nous nous servons habituellement. Il comportait une tige centrale fixée à un piédestal et d’où partaient des branches minces, disposées en trident et ayant chacune une lampe en métal forgé à son extrémité : il y en avait sept, pour manifester l’honneur dans lequel est tenu ce chiffre chez les Juifs. La Loi des Juifs venait après et fermait le défilé des dépouilles. »

 

Guerre des Juifs, VII, v, 5, § 148-150.

 

La table des pains de proposition et le chandelier à sept branches, que Flavius Josèphe a pu voir dans le cortège, sont figurés sur l’arc de triomphe de Titus élevé à Rome par son frère Domitien (voir photo ci-dessous).

Rome, arc de Titus (81 apr. J.-C.). Sont visibles : la table des pains de proposition, les trompettes en argent et le chandelier à sept branches

Rome, arc de Titus (81 apr. J.-C.). Sont visibles : la table des pains de proposition, les trompettes en argent et le chandelier à sept branches

Quant à la « Loi des Juifs », que mentionne également l’historien, il ne s’agit pas ici des tables de la Loi mais d’un rouleau de la Torah. Que sont devenus ces objets par la suite ? Sans doute la table destinée aux pains de proposition et le chandelier ont-ils été fondus et le précieux métal récupéré. Il ne s’agissait là, de toute façon, que de reproductions des pièces enlevées et détruites par Antiochos Épiphane en 169 av. J.-C. Mais quid de l’Arche d’Alliance et des tables de la Loi ?

 

L’histoire des tables est indissociable de celle de l’Arche puisqu’elles étaient enfermées dans celle-ci (I Rois VIII, 9 ; II Chroniques V, 10). C’était même, d’ailleurs, du temps de Salomon, tout ce qu’elle contenait. De fait, après la destruction du temple par l’armée du roi de Babylone en 587 av. J.-C., il n’est plus question de l’Arche d’Alliance ni des tables de la Loi (II Rois XXV, 9 ; II Chroniques XXXVI, 19). On perd définitivement leur trace. Le Saint des Saints du nouveau Temple construit de retour de l’exil et achevé en 515 av. J.-C. demeure vide jusqu’à sa destruction en 70 de notre ère. Une question se pose alors : pourquoi les auteurs sacrés ne nous précisent-ils pas ce que sont devenus l’Arche et son contenu ? L’ignoraient-ils, tout simplement, ou bien ont-ils volontairement choisi de n’en rien dire ?...

 

(à suivre)

Les Aventuriers de lArche perdue : scène culte (1981)

Suite de larticle (2/3) :

Voir également :

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